les moteurs électriques
Ce « petit  » chapitre ne va pas te faire décoller très haut : il va juste te munir de quelques tournevis et clés à molette pour comprendre les paramètres des moteurs électriques.
La première : au hasard.
C’est cette méthode qui a rendu l’électrique aussi populaire sur nos terrains :
– « pourquoi il veut pas monter ton truc ? T’es sà »r que t’es à fond ? » ,
– « tiens, t’es déjà posé. T’avais bien chargé les accus ?... »
– « Quand même, 37 secondes, Il a pas beaucoup d’autonomie ton truc ... »
– etc
En bref, succès assuré ...
La seconde : la rapide
On choisit rigoureusement ce que le constructeur préconise.
Temps moyen de réflexion : 1 minute, et on dispose du reste pour aller au ciné...
C’est pas mal, mais on se sent un peu prisonnier, voire un peu pigeon...
En plus, on est mal si on veut créer un modèle ou électrifier un planeur pur.
La troisième : calcul des puissances nominales
Tu veux faire monter ton planeur à xx m/s et puisque tu as scrupuleusement suivi les articles précédents, tu connais la classe de puissance dont tu as besoin. Il ne reste plus qu’à parcourir goulà »ment les articles et pub diverses qui donnent des classes de puissances et rendement.
Exemple :
Planeur de 1 kg, montant à 10 m/s , avec une hélice de 65% de rendement.
Réponse :
Il faut 100 Watt restitué par l’hélice pour monter à 10 m/s un planeur de 1 kg.
Cela impose 150 Watt fournis à l’arbre moteur. On peut donc prendre par exemple :
METEOR 250 réducté avec une hélice 11x8 :
7 éléments - 30 Amp - rendement 75% (donc 157 Watt à l’arbre)
Hélas, de nombreux fabricants très mal intentionnés ont ton nom sur une liste noire et font en sorte de ne te fournir que des infos inexploitables :
– Courant à vide
– Constante Kv
– Courant de blocage
– Nombre d’étages de la tour Montparnasse
– Résistance série
– Recette du tagine de mouton aux pruneaux
– Etc
La suite va donc te permettre de t’y retrouver un petit peu dans tout ce fatras de paramètres.
Allez, au boulot !
Préambule :
Avant de décrire les différents paramètres du moteur, en voici un schéma bloc qui fait apparaître la partie propulsion utile (dite électromotrice) de la partie dissipation néfaste :
– Le bloc R représente les pertes résistives des bobinages. On lui associe la tension Vr et la puissance Pr (dissipée par effet Joule sous forme de chaleur).
– Le bloc Kv représente la part électromotrice du moteur. On lui associe la tension Va et la puissance Pa, communiquée à l’hélice par l’arbre, incluant aussi Pf dissipée par frottements de rotation.
(il est très fréquent de négliger Pf pour des moteurs d’une certaine taille)
– Le moteur alimenté par la tension Vm, reçoit une puissance Pm
Les lois de Kirshoff (non ce n’est pas une marque de vodka !) nous donnent :
Equation en tension : Vm = Vr + Va
Equation en courant : Im = Ir = Ia
Equation en puissance : Pm = Pr + Pa + Pf
Sous-titrage simultanée en Français (dolby 5.1) :
– La tension aux bornes du moteur est égale à la tension des pertes résistives + la tension électromotrice
– Le courant est le même pour les pertes et la motricité
– La puissance d’alimentation du moteur est égale à la puissance dissipée par effet Joule par le moteur + la puissance fournie à l’arbre (incluant la puissance dissipée par frottements)
Je te propose une pause de 2 minutes, et on attaque la description des paramètres moteurs .... C’est parti
La résistance interne :
Les fils des bobinages ne sont pas des conducteurs purs. Plus ils sont longs et de faible diamètre, plus ils s’opposeront au passage du courant. Une tension apparaîtra proportionnellement au courant, piquant en conséquence une part de la tension d’alimentation à la tension électromotrice.
Vr = R . I
Cette résistance sera source de dissipation de puissance sous forme thermique (revoilà l’effet Joule !) et ce sera toujours ça qui ne sera pas communiqué à l’arbre de l’hélice ...
Pr = R . I2
Pour t’en assurer, laisse tourner 5 minutes ton moteur plein pot, et attrape-le à pleines mains :
Bravo, tu viens de découvrir ce qu’est la dissipation thermique !
Allez, décolle le moteur de ta paume, et on continue par quelques remarques :
– R est une constante pour un moteur donné. Elle dépend de la constitution des spires (diamètre du fil, longueur du fil donc nombre de spires et géométrie, alliage, taille des charbons, ...)
– Plus la résistance est forte, plus la tension électromotrice est faible (donc le régime)
– Plus la résistance est forte, plus la puissance à l’arbre est faible
– Plus la résistance est forte, plus le moteur dissipe par effet Joule
– Aimes-tu toujours la résistance des bobinages ?
Petit exemple :
Un moteur GRAUPNER Speed 500 BB RACE VS a une résistance de bobinage de 0,064 ohm.
Quelles sont ses pertes lorsqu’on l’utilise sous 8,4 V / 24 Amp ?
Réponse :
– pertes en tension Vr = R.i = 0,064 x 24 = 1,54 Volt (il restera donc Va = 6,86 Volt)
– Puissance dissipée par effet Joule = Pr = R.I2 = 37 Watt
un autre :
Un moteur ELECTRONIC MODEL CHRONOS 25 a une résistance de bobinage de 0,016 ohm.
Quelles sont ses pertes lorsqu’on l’utilise sous 10 V / 40 Amp ?
Réponse :
– pertes en tension Vr = R.i = 0,016 x 40 = 0,64 Volt (il restera donc Va = 9,36 Volt)
– Puissance dissipée par effet Joule = Pr = R.I2 = 25,6 Watt
La constante Kv :
Cette constante très importante relie la tension électromotrice au régime du moteur :
N = Kv . Va
N : régime moteur, en tr/min
Va : tension électromotrice, en volt
Kv : constante électromotrice du moteur, en tr/min/volt
NOTA :
On trouve parfois la constante inverse (en Volt / tr/min) mais c’est facile à détecter : si tes calculs mènent à un régime de 0.01 tour à l’heure, inverse Kv ...
On en déduit 2 formules utiles :
Va = N / Kv
Pa + Pf = N . I / Kv
Et les remarques suivantes :
– Kv est une constante pour un moteur donné. Elle dépend du nombre de spires du moteur, de leur géométrie, de la qualité des aimants...
– Plus Kv est grand, plus le moteur voudra tourner vite pour une tension donnée.
– Lorsqu’on ne charge pas l’arbre (pas d’hélice, donc Pa restreint à Pf), il ne reste que la puissance du frottement de rotation à vide du moteur. Pf est souvent approximée comme une constante. En toute rigueur, elle dépend du régime à vide (donc de la tension), mais elle est très vite négligeable devant la puissance utile donc souvent oubliée...
Petit ordre de grandeur :
Un moteur GRAUPNER Speed 500 BB RACE VS a une résistance de 0,064 et une constante Kv de 3100. Quel est son régime sous 8,4V / 24 Amp ?
Réponse :
Il perd Vr = R.i = 1,5 V. Il ne lui reste donc que Va = 8,4 - 1,54 = 6,86 V.
On en déduit son régime : N = Kv .Va = 3100 . 6,9 = 21266 tr/min
PS : utilisé avec un réducteur 2.8:1 on obtient un régime d’hélice de 7595 tr/min
Un autre exemple :
Le moteur ELECTRONIC MODEL CHRONOS 25 a une résistance de 0,016 ohm, et un Kv de 2465. Quel est son régime sous 10V / 40 Amp ?
Réponse :
Il perd Vr = R.i = 0,64 V. Il ne lui reste donc que Va = 10 - 0,64 = 9,36 V.
On en déduit son régime : N = Kv .Va = 2465 . 9,36 = 23072 tr/min
PS : utilisé avec un réducteur de 4:1, on obtient un régime d’hélice de 5768 tr/min
Courant à vide
Comme il est très fréquent de faire voler nos motoplaneurs en oubliant de mettre une hélice, les fabricants nous fournissent le courant à vide consommé par le moteur non chargé ! Plus sérieusement, différents frottements (paliers ou roulements, charbons, ...) font que le moteur sans hélice consomme quand même du courant. Ce courant, souvent de la classe de l’ampère est vite négligeable (< 10%) par rapport au courant consommé pour apporter l’énergie à l’hélice. Il est donc très fréquent qu’on néglige de retirer les frottements dans le bilan de puissance fournie à l’arbre moteur.
En toute rigueur, pour un régime donné, la puissance électromotrice fournie par le moteur vaut N.I/Kv, mais il ne subsiste réellement que N.(I-Io)/Kv à transmettre à l’hélice, car la puissance absorbée par le frottement vaut :
Pf = N . Io / Kv
Pa(réel) = N.(I-Io) / Kv
N : régime moteur, en tr/min
I : courant en charge
Io : courant à vide
Kv : constante électromotrice du moteur, en tr/min/volt
NOTA :
Bien évidemment, le courant à vide dépend de la tension d’alimentation. Dans leur grande bonté, les fabricants nous fournissent ce courant pour la tension nominale d’utilisation du moteur. Pour les en remercier, on négligera souvent la puissance de frottement, na ! Ca leur apprendra à ne pas nous donner des tableaux tous faits ...
Debout, là dedans ! Ca commence à ronfler au fond !
Vite reprenons nos exemples habituels pour illustrer ce paramètre :
Un moteur GRAUPNER Speed 500 BB RACE VS a une résistance de 0,064, une constante Kv de 3100 et un courant à vide de 1,4 Amp.
Quelle est la puissance dissipée en frottement sous 8,4V / 24 Amp ?
Réponse :
Il perd Vr = R.i = 1,5 V. Il ne lui reste donc que Va = 8,4 - 1,54 = 6,86 V.
On calcule son régime : N = Kv .Va = 3100 . 6,9 = 21266 tr/min
On en déduit la puissance dissipée en frottement :
Pf = N.Io / Kv = 21266 . 1,4 / 3100 = 9,6 Watt
A comparer aux 164 Watt transmis et aux 37 Watt perdus par Joule
Un autre exemple :
Le moteur ELECTRONIC MODEL CHRONOS 25 a une résistance de 0,016 ohm, un Kv de 2465 et un courant à vide de 2,6 Amp.
Quelle est la puissance dissipée en frottement sous 10V / 40 Amp ?
Réponse :
Il perd Vr = R.i = 0,64 V. Il ne lui reste donc que Va = 10 - 0,64 = 9,36 V.
On calcule son régime : N = Kv .Va = 2465 . 9,36 = 23072 tr/min
On en déduit la puissance dissipée en frottement :
Pf = N.Io / Kv = 23072 . 2,6 / 2465 = 24,3 Watt
A comparer aux 374 Watt transmis et aux 25 Watt perdus par Joule
Rendement
Te sens-tu enfin prêt à découvrir comment est calculé le rendement du moteur ? OUI !
Et bien, allons-y.
Le rendement du moteur est défini comme le rapport entre la vraie puissance fournie à l’hélice et la puissance d’entrée fournie au moteur.
Or, que manque-t-il en sortie :
– la puissance dissipée par effet Joule (liée à la résistance du bobinage)
– la puissance dissipée en frottement (liée au courant à vide)
D’où le simplissime calcul :
Rd = Pa / Pm , soit :
Rd = (Pm - Pr - Pf) / Pm
Ou, exprimé en fonction du régime :
Rd = [N.(I-Io)/Kv -R.I2] / (Vm.I)
Vite, vérifions tout cela sur nos 2 exemples (sans tout re-détailler !) :
Moteur GRAUPNER Speed 500 BB RACE VS :
– résistance de 0,064 ohm
– constante Kv de 3100
– courant à vide de 1,4 Amp
Quelle est le rendement sous 8,4V / 24 Amp (Ã 21266 tr/min) ?
Réponse :
Puissance d’entrée : 8,4 . 24 = 201,6 Watt
Puissance perdue en Joule = 0,064 . 242 = 37 Watt
Puissance perdue en frottement = 21266 . 1,4 / 3100 = 9.6 Watt
Puissance réelle à l’arbre = 155 Watt
Rendement = (201,6 - 37 - 9,6) / 201,6 = 155 / 201,6 = 77 %
En réalité, les performances sont bien moindres dès que la ferrite des aimants chauffe un peu : en comptant 60 % on est déjà plus proche de la réalité ...
Moteur ELECTRONIC MODEL CHRONOS 25 :
– résistance de 0,016 ohm
– constante Kv de 2465
– courant à vide de 2,6 Amp
Quelle est le rendement sous 10V / 40 Amp (Ã 23072 tr/min) ?
Réponse :
Puissance d’entrée : 10 . 40 = 400 Watt
Puissance perdue en Joule = 0,016 . 402 = 25,6 Watt
Puissance perdue en frottement = 23072 . 2,6 / 2465 = 24,3 Watt
Puissance réelle à l’arbre = 350 Watt
Rendement = (400 - 25,6 - 24,3) / 400 = 350 / 400 = 87,5% Miam !
On déduit également de ces calculs la puissance totale dissipée par le moteur :
– Puissance perdue par effet Joule
– Puissance perdue par les frottements
Pd = (Pm - Pa) = (Pr + Pf) = (1-Rd) . Pm
Dans nos exemples précédents :
Moteur GRAUPNER Speed 500 BB RACE VS sous 8,4V / 24 Amp (Ã 21266 tr/min)
Réponse :
Puissance d’entrée = 201,6 Watt
Puissance perdue en Joule = 37 Watt
Puissance perdue en frottement = 9.6 Watt
Puissance réelle à l’arbre = 155 Watt
Puissance totale dissipée = 46,6 Watt
Moteur ELECTRONIC MODEL CHRONOS 25 sous 10V / 40 Amp (Ã 23072 tr/min)
Réponse :
Puissance d’entrée = 400 Watt
Puissance perdue en Joule = 25,6 Watt
Puissance perdue en frottement = 24,3 Watt
Puissance réelle à l’arbre = 350 Watt
Puissance totale dissipée = 50 Watt
Allez, juste un petit effort, il ne reste que 17 pages de calcul !
On va se calmer un peu et juste découvrir quelques définitions, sans aucune équation, c’est promis !
tension nominale
C’est la tension autour de laquelle il est judicieux d’utiliser le moteur pour bénéficier du meilleur rendement :
– en dessous de cette tension, il faudrait pour une puissance de sortie égale augmenter le courant (en mettant une hélice plus forte, à plus bas régime) : les pertes ohmiques dégraderaient le rendement.
– au dessus de cette tension, il faudrait pour une puissance de sortie égale diminuer le courant (en mettant une hélice plus faible, à plus haut régime) : les pertes en frottement dégraderaient le rendement
– autour de cette tension : c’est tout bon (ou du moins, c’est le moins pire !)
Cependant, on s’autorise parfois à survolter les moteurs ferrite, au détriment du rendement, pour atteindre de forts régime (ex. : speed 400 pour petits avions rapides)
Courant au rendement max
C’est le courant autour duquel il est judicieux d’utiliser le moteur pour bénéficier du meilleur rendement :
– au dessous de ce courant, il valait mieux acheter un plus petit moteur : c’est plus léger et c’est moins cher !
– au dessus de ce courant, c’est Mr Joule qui se fait entendre et qui pirate le rendement
En conclusion, c’est une valeur très importante à respecter.
Cependant, on s’autorise souvent à la dépasser "un peu" sur les petits moteurs ferrite (1,5 fois !) au détriment du rendement, sinon on ne tirerait rien ...
Courant de blocage
On va finir par cette définition : c’est le courant que consomme le moteur quand l’arbre est bloqué. Pour info, il ne reste en vie dans ces conditions que quelques secondes.
A quoi peut donc bien servir cette caractéristique stupide ???
Elle permet d’estimer le courant que l’on peut faire encaisser au moteur pendant quelques dizaines de secondes, avec la formule empirique :
Pmax = Pblocage / 4
Personnellement, je ne l’utilise jamais, mais c’est vous qui voyez ...
Je préfère utiliser les règles suivantes si je dois dépasser le courant nominal de fonctionnement :
– soit : respecter les consignes du constructeur
(exemple du CHRONOS 25 : moins de 70 ampères pendant 20 secondes)
– soit : je me limite en vérifiant la température du moteur juste après une montée
(exemple : 25 ampères max sur un speed 500 BB RACE VS)
Et voilà , notre périple dans les méandres des paramètres moteurs est terminé.
Veuillez attendre l’arrêt complet avant de détacher votre ceinture et de vous lever.
Nous espérons que votre vol en notre compagnie vous a été agréable, et nous espérons vous revoir prochainement sur nos lignes.
Et si le 5ème épisode portait sur les hélices ? Ca serait pratique pour enfin faire le lien entre les Watt, les régimes, les vitesses, ...un peu de patience, c’est en cours !
Bons vols,
Gilles